
BRUNO GANZ
« L’AMI AMÉRICAIN » est une coproduction franco-allemande, écrite et réalisée par Wim Wenders, d’après un roman de la grande Patricia Highsmith. Il fait partie de cette mouvance appelée le « néo-noir », navigant dans les eaux troubles d’une intrigue policière tortueuse et d’un traitement résolument « film d’auteur ».
À Hambourg, un encadreur (Bruno Ganz) leucémique est manipulé par un escroc américain (Dennis Hopper) et un gangster français (Gérard Blain) pour commettre deux assassinats qui assureront la sécurité financière de sa femme (Lisa Kreuzer) et de son fils, quand il sera mort. Mais évidemment, rien n’est simple, l’amitié s’en mêle. L’intrigue est fascinante, elle est idéalement mise en valeur par la photo extraordinaire de Robby Müller, à la fois réaliste et ultra-stylisée, utilisant des taches de couleurs vives (rouge, orange, vert) dans des extérieurs lugubres ou la peinture des véhicules. Cela donne à cette histoire une ambiance de rêve éveillé tout à fait hypnotisante. Il faut bien sûr accepter la lenteur, les zones d’ombre jamais élucidées, le manque d’information sur les protagonistes, mais si on se laisse porter, « L’AMI AMÉRICAIN » vaut vraiment le déplacement. Des morceaux de bravoure comme le meurtre dans le RER parisien ou la longue séquence du train, sont absolument magnifiques. Si l’identification avec Ganz se fait immédiatement et que l’intériorité de l’acteur a rarement été aussi bien exploitée, Dennis Hopper incarne un « Tom Ripley » déconcertant, à moitié fou, enfantin parfois, dont le jeu frôle parfois le n’importe quoi dans ses impros. Mais le duo avec Ganz fonctionne très bien. Parmi les seconds rôles, plusieurs réalisateurs dont Nicholas Ray en faussaire ou Samuel Fuller en caïd à gros cigare.
Il faut aborder « L’AMI AMÉRICAIN » comme un voyage complètement original, sans repères, et se laisser porter par la machiavélique imagination de Mme Highsmith et par l’atmosphère à couper au couteau créée par le chef-opérateur. Adhésion non assurée, c’est certain, mais le film mérite qu’on tente l’aventure.

DENNIS HOPPER, NICHOLAS RAY ET BRUNO GANZ