« LE MESSAGER » est un pur mélodrame, se déroulant dans le Paris mondain des années 30 et dans une sinistre exploitation minière en Ouganda.
Là-bas, Jean Gabin business man ruiné, s’est exilé pour subvenir aux besoins de Gaby Morley qu’il vient d’épouser. Il devient rapidement alcoolique, en proie aux fièvres et se confie à Jean-Pierre Aumont son jeune adjoint. De retour à Paris, celui-ci a tellement entendu parler de l’épouse de son ami, qu’il en fait un transfert et a une liaison avec elle…
C’est extrêmement vieillot et poussiéreux. Les scènes « coloniales » sont difficilement acceptables aujourd’hui (la façon désinvolte dont sont filmés les « nègres », sans oublier les seins joyeusement dénudés des belles indigènes), mais malgré tout, le film ne manque pas d’un certain charme. D’abord Gabin y est magistral dans un personnage à facettes : jeune marié jovial et exalté, puis colon amer et suant le whisky délirant dans sa case et enfin mari trompé, froid et inflexible. Il passe d’un état à l’autre avec maestria, maintenant la cohérence du rôle et faisant preuve d’une complexité inespérée dans ce genre de film. Face à lui, Gaby Morlay est hélas complètement à côté de la plaque, vraiment pas taillée pour cet emploi de femme idéalisée et fatale. À 44 ans, elle était – et faisait ! – beaucoup plus âgée que Gabin, et cela déséquilibre leur relation. En jeune premier fébrile et geignard, Aumont rappelle ce qu’il fut dans « HÔTEL DU NORD ». Ce qui n’est pas un compliment. L’œil exercé du cinéphile reconnaîtra un tout jeune Bernard Blier, qui apparaît exactement trois secondes dans le rôle d’un chauffeur nommé… ‘Bernard’.
« LE MESSAGER » est un film un peu oublié dans cette période très faste de la carrière de Gabin, mais il vaut le détour pour son ambiance africaine bien glauque et pour son implacable mécanique psychologique.