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Archives de Catégorie: FILMS FRANÇAIS

« LE SECRET » (1974)

Adapté d’une Série Noire de Francis Ryck, « LE SECRET » de Robert Enrico est un thriller paranoïaque typique des années 70, qui confronte trois personnages à la machine d’État prête à éradiquer le moindre obstacle – ou potentiel obstacle – sur sa route.

Évadé d’un HP spécialisé dans la torture mentale et physique, Jean-Louis Trintignant se réfugie à la campagne, dans la maison délabrée d’un soixante-huitard rangé des voitures (Philippe Noiret) qui y vit avec sa femme (Marlène Jobert). C’est principalement un film d’acteurs centré sur le trio de vedettes, les seconds rôles ne sont que des silhouettes à peine filmées. C’est un festival Trintignant qui se délecte visiblement d’un rôle écrit sur-mesure de fugitif pathétique et dangereux, tout en ambiguïté et en contradictions. Il excelle dans cet emploi, surtout dans les moments où il dérape dans la mythomanie et le délire de persécution. On pense à la scène où il abat un forestier innocent, par exemple, à faire froid dans le dos. Face à lui, Noiret se repose beaucoup sur ses tics de jeu dans un rôle parfois illogique et irritant de vieil ours naïf et crédule. Jobert se débat courageusement avec un personnage pénible et sans relief. On aperçoit au début du film l’inquiétant Antoine St. John (« IL ÉTAIT UNE FOIS LA RÉVOLUTION ») en infirmier. « LE SECRET » n’est pas un grand film, les rebondissements sont trop téléphonés, le côté kafkaïen est trop ou pas assez développé et le dénouement, sur une plage des Landes, laisse curieusement insatisfait. Mais on se console avec une jolie BO d’Ennio Morricone (qui remplace François de Roubaix, le film étant une copro italienne) et le plaisir, malgré tout, de revoir ces beaux acteurs dans la force de l’âge, dans quelques séquences fortes et intenses.

JEAN-LOUIS TRINTIGNANT, MARLÈNE JOBERT, PHILIPPE NOIRET ET ANTOINE ST. JOHN
 

PHILIPPE LAUDENBACH : R.I.P.

PHILIPPE LAUDENBACH (1936-2024), SECOND RÔLE AUX 190 FILMS ET TÉLÉFILMS, NEVEU DE PIERRE FRESNAY. MÉMORABLE DANS « VIVEMENT DIMANCHE »
 
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Publié par le 23 avril 2024 dans CARNET NOIR, FILMS FRANÇAIS

 

« MILLE MILLIARDS DE DOLLARS » (1982)

Écrit et réalisé par le vétéran Henri Verneuil d’après un thriller « économique » américain, « MILLE MILLARDS DE DOLLARS » est surtout mémorable aujourd’hui pour avoir été l’avant-dernier film de Patrick Dewaere, sorti l’année de son décès prématuré.

Le scénario se veut une plongée dans l’univers tentaculaire des multinationales concentrant l’essentiel des richesses mondiales, une mondialisation dont les racines remonteraient à l’Allemagne nazie. Sujet potentiellement intéressant, mais complètement annihilé par une écriture platement démonstrative, des dialogues pied-de-plomb à la langue désuète, plombé par un total manque d’humour. Dewaere, improbable Tintin en costume-cravate, a rarement été aussi mal employé et garde la même expression butée pendant tout le film. La collision entre ce qu’il représentait alors dans le paysage français et ce cinéma déjà poussiéreux se passe vraiment mal. Autour de lui, ses partenaires se débattent avec des rôles sous-écrits : Charles Denner en « privé » pusillanime répétant sans arrêt la même chose, Mel Ferrer en PDG impitoyable sans une once du charisme exigé par le personnage (Douglas ou Lancaster auraient probablement sauvé une grande partie du film), Anny Duperey et Caroline Cellier dans des rôles transparents. Seule s’en sort à peu près Jeanne Moreau dans une unique scène, amusante en femme abandonnée abrutie par l’alcool et la déprime. Elle en fait beaucoup, certes, mais au moins se souvient-on de ce quasi caméo. « MILLE MILLIARDS… » a des choses à dire, c’est évident, trop sans doute, puisqu’à plus de deux heures, il aligne les séquences sur-dialoguées dans des bureaux ou des salles de conférence, les flash-backs inutiles (l’interminable procès en noir & blanc qui détruit le rythme général). Un cinéma d’un autre âge pour un sujet encore d’actualité, en somme.

PATRICK DEWAERE, JEANNE MOREAU, MEL FERRER ET CHARLES DENNER
 

« QUELLE JOIE DE VIVRE » (1961)

« QUELLE JOIE DE VIVRE » est le second des quatre films que René Clément tourna avec Alain Delon. Et il s’avère aussi peu connu qu’il est incongru dans la filmo des deux hommes. C’est une copro italo-française, mais 100% reliée à l’Histoire de l’Italie, puisqu’il décrit la lutte, en 1922, entre les fascistes, bientôt au pouvoir, et les anarchistes.

Contre toute attente, c’est une comédie, elle dure deux heures et désarçonne du début à la fin. Par amour pour une jolie fille (Barbara Lass), le naïf et fougueux Delon s’immisce dans une famille d’imprimeurs anarchistes qu’il était censé trahir, mais à laquelle il s’attache. Le reste est un véritable vaudeville avec ses quiproquos, ses malentendus, ses énormes ficelles. Le comique n’a jamais convenu à Delon qui s’agite beaucoup, fait des mines et joue les timides, face à de vieux routiers italiens comme Gino Cervi en patriarche bonhomme, Paolo Stoppa en infâme barbier délateur et dans de petits rôles : Ugo Tognazzi barbu, en poseur de bombes au langage inintelligible et Gastone Moschin en prêtre. On reconnaît même Clément lui-même en général français dans quelques plans. La jeune Miss Lass est bien mignonne et joue parfaitement les oies blanches facilement grugée par Delon qui se fait passer pour un leader anarchiste légendaire. La comédie est forcée de bout en bout – après tout, le sujet ne prête pas spécialement à rire – et le ton oscille entre la pantalonnade désordonnée et le (discret) pamphlet antifasciste. On se demande vraiment ce qui a pu attirer Clément dans un tel projet, complètement à part du reste de sa carrière et s’achevant dans une avalanche de gags ridicules autour de bombes laissées au milieu de la foule. Qui a bien pu trouver ça drôle ? Même à l’époque…

ALAIN DELON, BARBARA LASS, GINO CERVI, AROLDO TIERI, UGO TOGNAZZI ET CARLO PISACANE
 

« LA MEILLEURE FAÇON DE MARCHER » (1976)

Premier long-métrage de Claude Miller, « LA MEILLEURE FAÇON DE MARCHER » est une œuvre qu’on devine extrêmement personnelle, focalisée sur la confrontation entre un jeune homme sensible à la sexualité ambiguë et son exact opposé : un macho braillard et brutal, non dépourvu de zones d’ombres.

Cela se passe en 1960 dans une colonie de vacances. Parce qu’il a surpris son collègue moniteur Patrick Bouchitey habillé et maquillé en femme dans sa chambre, Patrick Dewaere ne va plus le lâcher, s’appliquer à l’humilier, à le déstabiliser, tout en éprouvant une attirance confuse. Un sujet apparemment un peu mince, mais admirablement développé dans un crescendo qui ne prendra fin qu’avec l’été et la lame d’un couteau. Le film doit énormément à ses interprètes, Bouchitey féminin et instable et surtout Dewaere absolument magnifique en salopard du quotidien un futur « gros beauf » dominateur, à la fois inquiétant et pathétique, sorte de bâton de dynamite toujours prêt à exploser. Ils sont bien entourés par la douce Christine Pascal, Claude Piéplu formidable en directeur de la colo dégoûté par la bêtise et la méchanceté des enfants dont il s’occupe, Michel Blanc, tout jeune, en moniteur obsédé sexuel : sa crise de nerfs au bord de la piscine est presque insupportable de tension. C’est d’ailleurs ce qu’on pourrait dire sur le film dans son entier. On dirait que le seul but de Miller en gommant tout manichéisme, tout jugement sur ses personnages est de mettre mal à l’aise, de laisser craindre le pire, même dans les situations les plus banales et anodines. Les face à face entre Bouchitey et Dewaere, culminant avec la danse finale qui met les nerfs à vif, sont d’une terrible violence interne. Le petit épilogue, situé quelques années après, remet les pendules à l’heure. À voir et revoir, un film singulier, unique en son genre, parfait en soi.

PATRICK DEWAERE, CHRISTINE PASCAL, PATRICK BOUCHITEY, CLAUDE PIÉPLU ET MICHEL BLANC
 
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AUJOURD’HUI, IL AURAIT EU 91 ANS…

 

« BERGMAN ISLAND » (2021)

Écrit et réalisé par la Française Mia Hansen-Løve, « BERGMAN ISLAND » est entièrement situé sur l’île de Fårö en Suède, où résida Ingmar Bergman et qui est aujourd’hui un véritable musée dédié à l’œuvre du maître et à un culte de la personnalité quelque peu bizarre. Le « Safari Bergman » organisé dans les décors de ses films n’étant pas le moins bizarre !

Un couple de cinéastes (Tim Roth et Vicky Krieps) séjourne à Fårö pour une sorte de séminaire où ils sont censés écrire chacun le scénario de leur prochaine production. Promenades, baignades, mini-crises larvées, le film prend ses aises pendant une bonne heure, permet de découvrir de beaux paysages, mais peine à accrocher l’intérêt. C’est alors que Krieps se met à raconter son script « in progress » à son mari et que le film dévie alors, dans les mêmes décors, sur la fiction qu’elle est en train d’imaginer : un mariage où se retrouvent deux anciens amants, Mia Wasikowska et Anders Danielsen Lie, qui renouent leur liaison obsessionnelle. Le problème, c’est que cette seconde histoire est tout aussi languissante que la première ! Les personnages sont superficiels, sans charme ni humour et, alors qu’on ne cesse de prononcer son nom et de citer les titres de ses chefs-d’œuvre, l’âme de Bergman est absente de ces images. Ce n’est qu’un prétexte, une toile de fond, et il serait bien difficile de trouver des parallèles entre « PERSONA », « CRIS ET CHUCHOTEMENTS » et le présent film. Roth traverse les séquences en touriste chiffonné, Krieps apporte heureusement un peu d’énergie mais n’a pas beaucoup de grain à moudre. Quant à Wasikowska, actrice à l’énorme potentiel dramatique, elle écope d’un rôle irritant et sans substance de midinette pot-de-colle. « BERGMAN ISLAND » est une déception qui aurait sans doute été moindre si le souvenir du maître Ingmar n’avait pas été vainement invoqué. Quant à l’épilogue où fiction et réalité se mêlent, on est tout de même bien loin de « LA MAÎTRESSE DU LIEUTENANT FRANÇAIS » !

 

« LE MÉPRIS » (1963)

BRIGITTE BARDOT, MICHEL PICCOLI ET FRITZ LANG

Écrit et réalisé par Jean-Luc Godard d’après le roman d’Alberto Moravia, « LE MÉPRIS » fait partie de ces films à part, pour lesquels toutes les planètes semblent s’être alignées. Il dégage une magie intemporelle, née de la fusion entre l’image (Raoul Coutard), la BO sublime (Georges Delerue), les paysages de l’Italie de Cinecittà à Capri et le charisme de Brigitte Bardot dans le rôle de sa vie.

Bâti en longues séquences dialoguées entrecoupées de travellings autour de statues antiques, le scénario suit le tournage d’une production américaine tournée à Rome par Fritz Lang. Le producteur (Jack Palance) déçu par les rushes engage un auteur français (Michel Piccoli) pour réécrire le scénario. Celui-ci est marié à une belle jeune femme indolente qui attire l’œil rapace du mogul. Lors d’une rencontre, celle-ci cesse subitement d’aimer son époux et même… à le mépriser. Parce qu’il l’a laissée sciemment entre les griffes de Palance pour décrocher le contrat ? Parce qu’elle le voit soudain tel qu’il est ? Faible, velléitaire, veule… « LE MÉPRIS » devient alors l’histoire d’un désamour, la rapide désagrégation d’un couple aimant. Dans des décors de rêve, on assiste, lors d’une très longue dispute domestique dans un appartement, aux ultimes soubresauts de cette relation. Et c’est cruel, réaliste, à la fois indéfinissable et définitif. Le film est parsemée de détails de couleur rouge-vif (la voiture et le pull de Palance, la serviette de bain, le canapé, etc.) qui annoncent finement l’inéluctable conclusion. Bardot accapare 80% de l’intérêt, voire de la fascination, dans ce rôle de petite dactylo affable basculant dans une fatale prise de conscience. Mais Piccoli – alors peu connu – est remarquable dans un personnage complexe et, au fond, assez minable. Palance crève l’écran en producer inculte, despotique et exalté face à Lang, vieillard chenu et bienveillant, ne s’exprimant qu’en citations érudites. « LE MÉPRIS » doit énormément à sa musique, qui transcende littéralement les images et il peut se voir, se revoir encore, avec le même bonheur de cinéma. À condition, bien sûr, d’être sensible à sa petite musique.

BRIGITTE BARDOT, JACK PALANCE ET MICHEL PICCOLI
 

MICHELINE PRESLE : R.I.P.

MICHELINE PRESLE (1922-2024), ACTRICE À LA LONGUE ET BELLE CARRIÈRE INTERNATIONALE RESTÉE TRÈS POPULAIRE
 
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Publié par le 21 février 2024 dans CARNET NOIR, FILMS FRANÇAIS

 

GÉRARD BARRAY : R.I.P.

GÉRARD BARRAY (1931-2024) ACTEUR DE FILM D’AVENTURES ET DE CAPE ET D’ÉPÉE DES SIXTIES, UNE LONGUE CARRIÈRE EN ESPAGNE
 
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Publié par le 16 février 2024 dans CARNET NOIR, FILMS FRANÇAIS