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Archives de Catégorie: LES FILMS DE JOE DON BAKER

« TUEZ CHARLEY VARRICK ! » (1973)

Adapté d’un roman de John Reese, produit et réalisé par Don Siegel alors au sommet de sa carrière, « TUEZ CHARLEY VARRICK ! » est un des meilleurs polars des seventies et un des plus représentatifs de la veine hard boiled de cette époque.

Un petit braqueur (Walter Matthau) dévalise une modeste banque au Nouveau-Mexique. Il y perd son épouse abattue par la police et embarque, sans le savoir 750 000 $ appartenant à la mafia de Las Vegas. Il se retrouve avec un tueur (Joe Don Baker) aux trousses. Un scénario des plus simples, une psychologie réduite au strict nécessaire, pour un film à l’efficacité épatante, boosté par la BO d’un Lalo Schifrin en grande forme. La première surprise vient évidemment de la présence de Matthau, alors connu pour ses comédies, dans un rôle qui aurait plutôt convenu à Marvin ou Bronson. Son flegme et sa nonchalance endormie, même dans les pires situations, font de Varrick un personnage unique et imprévisible. Face à lui, Baker est exceptionnel en hitman à l’élégance texane, fumant la pipe et aimant torturer et tuer à mains nues, avec un bon sourire patelin. Une sorte de Terminator que rien ne semble pouvoir arrêter. Ils sont entourés par une brochette de grands seconds rôles comme John Vernon à son plus suave, Norman Fell ou Andy Robinson qui fut révélé par Siegel dans « L’INSPECTEUR HARRY ». Le trio de comédiennes belles, mûres et tout aussi dures-à-cuire que les hommes, est formidable : Sheree North, Felicia Farr et Jacqueline Scott. Le scénario est parfaitement ficelé, les séquences d’actions sont saisissantes et sans esbroufe et la machination infernale de Varrick est suffisamment élaborée pour qu’on ne la voie pas venir. Un petit classique qu’on peut voir et revoir sans jamais s’en lasser et, très certainement, une des plus belles réussites de Siegel.

À noter : Quand Baker s’annonce en arrivant chez Sheree North, elle dit, désabusée : « Je ne m’attendais pas à voir débarquer Clint Eastwood ! ». Clin d’œil sympathique à l’acteur-fétiche du réalisateur.

JOE DON BAKER, WALTER MATTHAU ET ANDY ROBINSON
 

« ADAM AT 6 A.M. » (1970)

Unique long-métrage du téléaste Robert Sheerer, « ADAM AT 6 A.M. » est sorti la même année que « CINQ PIÈCES FACILES » avec lequel il offre de nombreuses similitudes : un jeune homme issu d’un milieu bourgeois décide de découvrir l’Amérique profonde et profite de l’enterrement d’un membre de sa famille pour s’installer provisoirement en province.

Filmé de façon étonnamment moderne, le film est une tranche de vie où rien n’est assené ou martelé. On devine les états d’âme de ce garçon qui semble n’avoir sa place nulle part, proie idéale pour une jeune fille à marier rêvant de le faire entrer dans un moule de médiocrité autosatisfaite. À 26 ans, Michael Douglas a un jeu assuré et mature qui donne toute sa profondeur à ce personnage taiseux, incertain, en quête de lui-même. Il est sympathique, ouvert, mais assez lucide pour comprendre que cette existence n’est pas faite pour lui. Pas plus que celle d’ouvrier itinérant, job qu’il endosse pour l’été et qui s’avère tout aussi désespérante. Autour d’un Douglas qui focalise l’attention sans jamais surjouer ses émotions, de grands seconds rôles : Lee Purcell en fiancée charmante, mais destinée à devenir le portrait craché de sa mère (excellente Louise Latham), Joe Don Baker – tellement naturel, qu’on dirait réellement un « gars du cru » – en brave prolo qui rêve d’une vie meilleure, mais se gaspille en beuveries et perd systématiquement sa paie avec des prostituées peu ragoûtantes et des parties de billard. C’est certainement un de ses plus jolis rôles et il vole plus d’une fois la vedette à Douglas. On aperçoit les incroyables yeux bleus de Meg Foster au début, en conquête d’un soir. « ADAM AT 6 A.M. » situé en pleine guerre du Vietnam (il n’y est fait allusion qu’une seule fois), replonge dans une Amérique aux idéaux déjà gangrénés et donne grandement à réfléchir sur la liberté, les choix qu’on fait dans la vie et le refus de la facilité. À découvrir.

MICHAEL DOUGLAS, LOUISE LATHAM, LEE PURCELL ET JOE DON BAKER
 

« FINAL JUSTICE » (1984)

Écrit et réalisé par Greydon Clark, « FINAL JUSTICE » tente de tirer les dernières gouttes de la popularité de Joe Don Baker aux U.S.A. en le plaçant dans un vague remake de « UN SHÉRIF À NEW YORK » de Don Siegel relocalisé sur l’île de Malte.

Il y a série B et série Z. La seconde catégorie – où se situe le présent film – n’a ni l’humour, ni le charme, ni l’efficacité du bon « B movie ». Ce nanar frise l’amateurisme pur et simple, de l’image hideuse à la BO épouvantable, aux interminables poursuites touristiques, en passant par la prise de son « direct » souvent inaudible, c’est un pur désastre du début à la fin. Baker, shérif Apache (sic !) du Texas est chargé d’escorter à Malte un hitman sicilien (Venantino Venantini) dont il a abattu le frère. Celui-ci lui échappe, bien sûr, et Geronimo (c’est son nom !) se lance à ses trousses, assisté d’une jolie fliquette locale (Patrizia Pellegrino). Que dire ? C’est tellement plat, mal écrit, atrocement réalisé, qu’on a presque envie d’en rire. Baker porte une tenue de cowboy grotesque, il affiche un surpoids qui le fait plus ressembler à Orson Welles qu’à Eastwood et se traîne, l’air boudeur, dans ce rôle de flic entêté mais totalement incompétent (sa co-équipière lui sauve plusieurs fois la mise). Échappé des comédies de Lautner, Venantini est plutôt bon en tueur sadique et violeur patenté, toutes les comédiennes apparaissent topless et le vétéran Rossano Brazzi joue les mafiosi patelins. On reconnaît également ce bon vieux Bill McKinney en commissaire à l’air louche. « FINAL JUSTICE » n’attirera vraiment que les fans de Joe Don Baker, même s’il n’est pas à son avantage là-dedans, qui retournera très bientôt aux seconds rôles de sa jeunesse. Il avait atteint là les tréfonds de sa carrière en dents de scie.

JOE QUATTROMANI, JOE DON BAKER, VENANTINO VENANTINI ET PATRIZIA PELLEGRINO
 

« JUSTICE SAUVAGE » (1973)

JOE DON BAKER

Inspiré de faits réels qui inspirèrent plusieurs films et séries TV, « JUSTICE SAUVAGE » de Phil Karlson apparaît aujourd’hui comme une quintessence, presque un maître-étalon du polar hard-boiled des seventies, avec une pincée de blaxploitation, des guerres entre rednecks et un shérif tout-d’un-bloc à la droiture d’un héros de western.

Dans la lignée des films de vigilantes de l’époque, celui-ci prend pour protagoniste Joe Don Baker – dans le rôle de sa vie – un ex-catcheur rentrant avec sa famille dans son Tennessee natal, pour trouver sa ville en proie à la mafia, au vice et à la corruption généralisée. Gravement blessé dès son arrivée dans un tripot digne de Sodome et Gomorrhe (version plouc), il est bientôt élu shérif et entreprend aussitôt de remettre de l’ordre. Mais les malfrats sont nombreux et rien ne les arrête. Un sujet simple, sans complication, mais un film qui tient très bien la route, avec une réalisation qui va droit au but, des séquences d’action extrêmement sanglantes, des méchants haïssables et… surtout Baker à son summum. Bon géant débonnaire, gentil mari, fils dévoué, il se transforme en Cro-Magnon armé d’un gourdin pour mener sa guerre contre les voyous. Très expressif, souvent émouvant, Baker est pour beaucoup dans la réussite et la bonne tenue du film. Il est bien entouré par Bruce Glover et Felton Perry jouant ses adjoints, Elizabeth Hartman dans le rôle de sa femme, quelques vétérans de la série B comme Gene Evans, Ken Tobey ou Noah Beery, Jr. et surtout Brenda Benét troublante, en prostituée qui devient l’indic de notre héros. Prenant du début à la fin, malgré une photo de téléfilm typique de ces années-là et une durée surprenante, « JUSTICE SAUVAGE » est encore aujourd’hui un film puissant et sans concession, parfois un brin réac sur les bords et aux décors un peu pauvrets, mais solide et efficace à 100%.

JOE DON BAKER ET BRENDA BENÉT

 
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AUJOURD’HUI, JOE DON BAKER A 85 ANS !

 
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Publié par le 12 février 2021 dans ANNIVERSAIRES, LES FILMS DE JOE DON BAKER

 

« ÉCHEC À L’ORGANISATION » (1973)

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ROBERT DUVALL ET JOE DON BAKER

Écrit et réalisé par John Flynn, d’après un roman de Donald E. Westlake très proche de son propre « POINT DE NON-RETOUR », « ÉCHEC À L’ORGANISATION » est une sorte de concentré du polar « hard boiled » des années 70 et une perfection dans le genre.OUTFIT

À peine sorti de prison, le braqueur Robert Duvall est aussitôt assailli par des tueurs de la mafia qui ont déjà tué son frère. En effet, leur dernier job fut l’attaque d’une banque appartenant – à leur insu – à la mafia. Avec l’aide de sa fiancée Karen Black et de son vieux complice Joe Don Baker, Duvall va réclamer 250 000 $ au chef des gangsters (Robert Ryan) et lui rendre coup pour coup. Sujet simple, exécution sobre et violente. Duvall n’est pas un « héros » facile à aimer : il est froid, taiseux, maltraite les femmes, se montre entêté jusqu’à la folie suicidaire. Son acolyte Baker, dans ce qui est peut-être son meilleur rôle, est plus humain tout en demeurant une brute sans états d’âme. Face à ce tandem de bulldozers, Karen Black illumine trop brièvement l’écran en gentille fille amoureuse d’un sale type. Le reste de la distribution est un éblouissant défilé de figures du film noir des années 40 (Marie Windsor, Jane Greer, Elisha Cook, Jr., Emile Meyer) et de trognes contemporaines telles que Timothy Carey, Bill McKinney, Richard Jaeckel, Tom Reese, sans oublier les « bad girls » Sheree North et Joanna Cassidy. Mené à un train d’enfer, truffé de séquences d’action bluffantes de réalisme, « ÉCHEC À L’ORGANISATION » tient en haleine pendant plus de 100 minutes sur un sujet pourtant assez mince. Mais, cousin du Lee Marvin du film de John Boorman cité plus haut, le ‘Macklin’ de Duvall est un parfait anti-héros de son temps, défini par ses actions et son habileté aux armes à feu. L’attaque de la maison du caïd à la fin, est un admirable morceau de bravoure. Un petit chef-d’œuvre qui n’a pas pris la moindre ride.

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JOANNA CASSIDY, ROBERT RYAN, ROBERT DUVALL ET JOE DON BAKER

 

« TUER N’EST PAS JOUER » (1987)

TUERPremier 007 de l’ère post-Roger Moore, « TUER N’EST PAS JOUER » est signé John Glen ex-monteur qui réalisa justement les derniers – et moins bons – Moore.

C’est à présent Timothy Dalton qui endosse le smoking de l’agent secret de Sa Majesté et, s’il a l’âge idéal et le physique adéquat, on ne peut pas dire qu’il semble très à son aise. Son James Bond manque d’épaisseur, de dureté, de cynisme, c’est un gentil garçon affable, délicat avec les dames, répugnant à tuer ses ennemis. Il faut dire à sa décharge que le scénario est désastreux, démarrant comme les vieux films d’espionnage de la Guerre Froide des années 60 et s’achevant comme un « Tintin chez les Afghans ». Les décors manquent de lustre, les gadgets sont un brin minables (le petit porte-clés qui lâche du gaz paralysant quand on siffle l’hymne britannique !). On voyage beaucoup, de Gibraltar à Tanger, en passant par Vienne. Mais deux heures, c’est parfois très long ! D’autant plus que si Dalton ne propose pas un héros très charismatique, il est qui plus est, extrêmement mal entouré par la frêle Maryam d’Abo la plus nunuche des James Bond girls, par Jeroen Krabbé qui cabotine et minaude sans retenue en vrai/faux transfuge russe, sans parler d’Art Malik involontairement hilarant en leader des Moudjahidin. Et que dire de notre ami Joe Don Baker, acteur tous-terrains pourtant capable de se sortir de n’importe quelle situation ? Il est carrément grotesque en trafiquant d’armes pansu jouant avec des soldats de plomb. Non, « TUER N’EST PAS JOUER » n’a pas apporté à la franchise inspirée de l’œuvre de Ian Fleming le second souffle tant espéré et attendu. Dalton est un réel progrès par rapport à Moore, c’est indéniable, mais il aurait dû pouvoir s’appuyer sur un bon scénario et des dialogues moins crétins. L’acteur en tournera un second avant de jeter l’éponge, ce qui n’était pas très difficile à prévoir.

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TIMOTHY DALTON, JOE DON BAKER ET MARYAM D’ABO

 

« LA TRAHISON SE PAIE CASH » (1975)

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JOE DON BAKER

« LA TRAHISON SE PAIE CASH » (excellent titre français, pour une fois !) est un polar de vengeance sans surprise, réalisé par le vétéran tous-terrains Phil Karlson pour mettre à profit le récent succès de son « JUSTICE SAUVAGE » avec la même vedette : Joe Don Baker.FRAMED

L’intérêt, si intérêt il y a, ne réside certes pas dans un scénario « hard boiled », languide et poussif, qui suit les malheurs d’un joueur professionnel piégé pour le meurtre d’un shérif-adjoint. Il est confronté à la mafia et à la corruption des politiciens du Tennessee, à ses codétenus. Tout est prévisible, lourdingue et seuls les flashes d’ultraviolence viennent sortir de la torpeur. Car, avec sa photo hideuse de téléfilm, sa bande-son qui écorche les oreilles, le film aurait pu sombrer corps et bien dans l’oubli, comme bon nombre de séries B des seventies. Seulement, il y a Joe Don Baker. Acteur-culte aux U.S.A. pratiquement inconnu en Europe, qui connut une vraie renommée entre 1973 et la fin de la décennie. Ici, il crève l’écran dans un emploi très particulier de brute épaisse, véritable bulldozer humain, capable d’endurer tous les passages à tabac, sans jamais baisser la tête, sans jamais s’écraser. Un personnage d’éléphant dans un magasin de porcelaine, qu’il joue avec une sorte de délectation méchante, entouré par de bonnes « tronches » de l’époque comme Brock Peters, John Marley en mafioso sympathique, Gabriel Dell ou Roy Jenson qui assure avec Baker une scène de bagarre à mains nues d’une sauvagerie inouïe. Seule femme au générique, la chanteuse Conny Van Dyke joue… une chanteuse amoureuse de ce grizzly de Joe. Pas un grand film donc, « LA TRAHISON SE PAIE CASH », par la faute d’un grand laisser-aller dans l’esthétique et d’une écriture relâchée et paresseuse. À voir tout de même parce que Baker n’a pas tourné autant de films que cela en tête d’affiche, et qu’il vaut vraiment le détour.

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JOE DON BAKER, CONNY VAN DYKE ET ROY JENSON

 

« MONGO’S BACK IN TOWN » (1971)

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JOE DON BAKER

Inspiré d’un roman de E. Richard Johnson, repris de justice et écrivain, « MONGO’S BACK IN TOWN » est un téléfilm tourné par Marvin J. Chomsky (« HOLOCAUSTE »), avec un budget excessivement restreint, mais un vrai point-de-vue et une distribution de tout premier ordre.

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SALLY FIELD ET TELLY SAVALAS

Mongo Nash (Joe Don Baker), tueur-à-gages, sort de prison après cinq ans et retrouve son frère Charles Cioffi qui veut l’engager pour éliminer un rival menaçant sa mainmise sur la fausse monnaie. Mais rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît et ‘Mongo’ se retrouve au cœur d’une machination infernale. Le pitch est simple, sans grande originalité, mais le traitement de l’image et du son fait de ce téléfilm un véritable objet de curiosité. D’abord, c’est d’une noirceur très inaccoutumée à la TV de cette époque, tout se passe pendant les fêtes de Noël, sous une pluie battante et ininterrompue. Ensuite, les décors sont tellement fauchés et minimalistes, qu’on se croirait parfois sur une scène de théâtre d’avant-garde. Et enfin, la BO de Michael Melvoin apporte une atmosphère de cauchemar éveillé très angoissante. L’attraction n°1, c’est Joe Don Baker, exceptionnel en brute épaisse. Un antihéros sans humour, sans charme, capable de terroriser une pauvre fille sans défense (Sally Field) pour en faire son esclave et de tabasser son ex pour lui soutirer un renseignement. Un portrait de tueur sans concession, que l’acteur incarne avec une sorte de perversité taciturne et fataliste. Il crève vraiment l’écran. Autour de lui, Telly Savalas et Martin Sheen forment un tandem de flics sans grande épaisseur, Anne Francis est une barmaid désabusée. « MONGO’S BACK IN TOWN » serait certainement plus connu et diffusé s’il avait été tourné pour le cinéma. Mais il n’a pas complètement disparu dans les limbes encore aujourd’hui et s’est imprimé dans la mémoire de certains cinéphiles amoureux du ‘film noir’. Les six premières minutes, totalement dépourvues de dialogue, sont un petit chef-d’œuvre en soi (il faut avoir vu Baker démolir l’étalage d’un faux aveugle qui le laisse faire sans réagir !). La réalisation suffocante, tout en gros-plans et en pénombre de Chomsky apporte beaucoup à la fascination exercée par le film.

À noter : il fut diffusé en France sous les titres « LE RETOUR DE MONGO » et « LE RETOUR DU TUEUR ».

 

« JUNIOR BONNER, LE DERNIER BAGARREUR » (1972)

BONNER copie« JUNIOR BONNER, LE DERNIER BAGARREUR » (encore un titre français bien gratiné !) fait partie des films « à part » de Sam Peckinpah. Une de ces œuvrettes nostalgiques, un peu informes, teintées de comédie pas spécialement légère, à l’instar de son téléfilm « THE LOSERS » ou de « UN NOMMÉ CABLE HOGUE ».

Malgré les réelles qualités de celui-ci, force est de reconnaître qu’il ne fait pas partie de ce que ‘Bloody Sam’ a fait de plus mémorable. Il nous offre un week-end au sein de l’Amérique profonde, le temps d’un rodéo. Le ton est documentaire (la moitié du métrage semble être l’œuvre d’une seconde équipe), la photo de Lucien Ballard très naturaliste, le rythme totalement relâché, le scénario réduit à sa plus simple expression. La thématique : le vieil Ouest englouti par les bulldozers du progrès en marche, l’Amérique des pionniers transformée en carnaval grotesque pour touristes, est beaucoup trop mise en avant et frôle le prêchi-prêcha énervant. Les séquences de rodéos, les bagarres de saloon semblent interminables et l’ennui s’installe au bout d’une demi-heure pour ne faire que s’épaissir. Reste le style souvent imité mais inimitable du réalisateur, le charme du cast, indéniable : Steve McQueen qui, à 42 ans, a perdu de son animalité et campe un champion mûrissant, un loser usé refusant (ou incapable) de changer de vie, quitte à tout perdre. Le corps meurtri, c’est toujours un tombeur charismatique, mais l’âge a ralenti ses réflexes et éteint son agressivité. Il fait une prestation attachante, rare dans sa carrière. Robert Preston et Ida Lupino jouent ses parents, ils ont un face-à-face magnifique vers la fin, Joe Don Baker est le frère cadet, promoteur cynique et « homme du futur » contribuant à enterrer définitivement l’Ouest légendaire. On retrouve Ben Johnson et Bill McKinney. « JUNIOR BONNER » semble trop improvisé et sans colonne vertébrale pour passionner vraiment. Il est à voir bien sûr, si on aime Peckinpah et McQueen (qui devaient se retrouver la même année pour le plus probant « GUET-APENS »), mais il est difficile de se passionner ou même de lui garder une réelle affection. À peine une indifférence amicale…

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STEVE McQUEEN, IDA LUPINO, ROBERT PRESTON ET JOE DON BAKER