BURT LANCASTER
Les trois protagonistes de « L’HOMME DE LA LOI » sont d’anciens héros vieillissants de la légende de l’Ouest : un shérif auréolé de ses exploits passés (Robert Ryan), un rancher qui a dompté une terre sauvage (Lee J. Cobb) et un marshal (Burt Lancaster), qui est le seul à n’avoir pas évolué depuis toutes ces années.
Alors que le monde avance vers le vingtième siècle, ‘Maddox’ est resté ce représentant de la loi psychorigide, inflexible jusqu’à l’inhumanité. Il arrive dans une petite ville pour ramener dans la sienne plusieurs cowboys au service de Cobb, accusés de la mort accidentelle quelques mois plus tôt d’un passant. Incapable de transiger, de négocier ou même de dialoguer, Maddox va déclencher un véritable bain de sang. Le film tout entier se focalise sur le portrait de cet individu effrayant de raideur, accroché aux règles jusqu’à en devenir obsessionnel. Avec sa silhouette alourdie, son visage abimé de cicatrices, Lancaster est l’interprète rêvé de ce western âpre et cruel, qui se bonifie avec les années, malgré la mise-en-scène un peu désuète de Michael Winner. L’acteur parvient à affiner un peu la psychologie du personnage, à le rendre moins monolithique, par des détails incongrus : il joue de la flûte, aime saucer ses plats avec du pain. On parle beaucoup d’honneur, de lâcheté, des temps qui changent, de la difficulté à être et avoir été, entre deux duels sanglants. On notera l’étrange relation liant Cobb et Salmi, inséparables depuis trente ans, et le comportement de veuf éploré du premier, à la mort du second. Si le grand Burt domine chaque séquence où il apparaît, c’est Ryan qui a le rôle le plus intéressant, celui de ce héros légendaire qui « n’a plus l’estomac » et vivote en se tenant discrètement dans l’ombre quitte à essuyer quelques injures au passage. Autour d’eux, de grands seconds rôles comme Joseph Wiseman en avatar de ‘Doc Holiday’, Robert Duvall, Ralph Waite, Albert Salmi, Richard Jordan particulièrement bien servi par le scénario et la toujours parfaite Sheree North en ex-maîtresse de Maddox vieillie avant l’âge. Pas suffisamment soigné visuellement (bien qu’il soit tourné au Nouveau-Mexique, le film fait parfois penser aux séries B filmées à Almeria !), « L’HOMME DE LA LOI » peine à se hisser au niveau des véritables chefs-d’œuvre du genre, mais il tient remarquablement bien le coup, 45 ans après sa sortie, et sa fin totalement nihiliste laisse un arrière-goût amer et démythifie définitivement le héros de western inventé par Hollywood.
ROBERT DUVALL, J.D. CANNON, ROBERT RYAN, LEE J. COBB, JOHN BECK ET BURT LANCASTER
À noter plusieurs détails prémonitoires : Lee J. Cobb se nomme ‘Bronson’ dans « L’HOMME DE LA LOI » et les villageois parlent plusieurs fois de « vigilante ». On le sait, trois ans plus tard, Winner tournera son plus grand succès : « UN JUSTICIER DANS LA VILLE », avec Charles… Bronson. Coïncidences…