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Archives Mensuelles: mars 2021

HAPPY BIRTHDAY, PATRICK !

PATRICK MAGEE (1922-1982), ACTEUR AU STYLE PARFOIS OUTRANCIER, QUI MARQUE TOUS LES FILMS OÙ IL APPARAÎT, SPÉCIALEMENT « ORANGE MÉCANIQUE »
 
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Publié par le 31 mars 2021 dans ANNIVERSAIRES, CINÉMA ANGLAIS

 

« LE SECRET DES MARROWBONE » (2017)

« LE SECRET DES MARROWBONE » est le premier long-métrage réalisé par le scénariste espagnol Sergio G. Sánchez (« L’ORPHELINAT ») et il s’inscrit ouvertement dans les travées d’une autre magnifique production ibérique : « LES AUTRES » (2001), dont il reprend la thématique.

Présenté comme une « ghost story » classique, le film développe son récit à tiroirs avec une machiavélique assurance, créant un mystère de plus en plus épais autour de cette famille anglaise émigrée aux U.S.A. à la fin des années 60. Fuyant un père monstrueux, la femme et ses quatre enfants s’installent dans une vieille demeure familiale qui semble hantée. À la mort de la mère, la fratrie poursuit sa vie d’isolement… Ceci n’est évidemment que le commencement d’une histoire effrayante, narrée de façon elliptique, dissimulant intelligemment des éléments-clés pour les révéler au moment opportun et laissant libre-cours à l’imaginaire du public. Pour qui a vu le chef-d’œuvre d’Alejando Amenábar cité plus haut, il n’est pas trop compliqué de voir venir le gros ‘twist’, mais le scénario ne se résume heureusement pas à cela, et entraîne de surprise en surprise avec quelques scènes-choc dont on a du mal à se remettre. Le film est dominé par l’intense George MacKay (« 1917 ») en chef de famille fragile mais déterminé, très bien entouré par Anya Taylor-Joy en voisine généreuse et qui – pour une fois – n’est pas le personnage le plus étrange du film ! Mia Goth est parfaite en sœur protectrice et Kyle Soller tire le maximum d’un rôle d’avocat insidieux et âpre au gain. Il ne faut surtout pas trop en dire sur les tenants et aboutissants de ce « SECRET DES MARROWBONE », car une bonne partie du plaisir qu’il procure vient des coups de théâtre et des fausses-pistes qu’il déploie. Et il s’achève sur un éloge de la fuite dans la folie, tout à fait déconcertante. C’est une très belle réussite, magnifiquement scénarisée, très élégamment filmée, qui vaut largement la découverte.

GEORGE MacKAY, CHARLIE HEATON, MATTHEW STAGG, MIA GOTH ET ANYA TAYLOR-JOY

 

« LES CANONS DE NAVARONE » (1961)

Inspiré d’un roman d’Alistair MacLean, « LES CANONS DE NAVARONE » est une des (rares) franches réussites de la longue carrière de l’anglais J. Lee-Thompson et, encore aujourd’hui, un modèle de blockbuster qui engendrera de nombreux films de guerre et d’aventures comme « 12 SALOPARDS » ou « QUAND LES AIGLES ATTAQUENT ».

Le scénario est simple : en 1943, six soldats ont une semaine pour détruire deux énormes canons implantés sur l’île grecque de Navarone, avant qu’ils ne servent à massacrer des centaines d’hommes de l’armée britannique immobilisés sur une autre île. Ce n’est pas tant la mission elle-même qui passionne dans ce film, que la description de ses héros et des conflits internes qui les déchirent et mettent leur job en péril. Thompson a réuni un casting quasi-parfait : Gregory Peck impeccable en officier rigide et taiseux constamment remis en question par son commando, Anthony Quinn – dans un de ses meilleurs rôles – en résistant grec redoutable et ombrageux (la scène où il se fait passer pour un lâche est inoubliable), David Niven en spécialiste en explosifs peu téméraire, Stanley Baker excellent en tueur-né qui ne supporte plus de tuer. Même les personnages féminins, Irène Papas et Gia Scala, ne semblent pas plaqués sur l’histoire, comme trop souvent dans les films de guerre de cette époque. Elles enrichissent l’action de manière très inattendue. On notera une brève apparition de Richard Harris dans le prologue, en soldat australien en colère. Malgré sa copieuse durée (158 minutes !), « LES CANONS DE NAVARONE » se suit sans une seconde d’ennui ou d’impatience. Les enjeux humains sont intelligemment développés (les contentieux entre Peck, Quinn et Niven, extrêmement bien écrits, l’histoire d’amour entre Quinn et Papas est pudique et crédible), les séquences d’action sont encore efficaces malgré des F/X évidemment datés. C’est du très bon travail et, s’il fallait chercher la petite bête, on pourrait renâcler un peu sur la BO de Dimitri Tiomkin beaucoup trop présente et écrasant parfois l’atmosphère et le peu d’intérêt de James Darren et Anthony Quayle dans des rôles qui auraient mérité d’être mieux distribués. À part cela, c’est un film assez admirable dans son genre, qu’on peut revoir sans crainte aucune d’être déçu.

À noter : 17 ans plus tard, Guy Hamilton tournera une sequel : «  L’OURAGAN VIENT DE NAVARONE » où Robert Shaw et Edward Fox reprendront les personnages de Peck et Niven pour de nouvelles aventures.

IRÈNE PAPAS, GREGORY PECK, GIA SCALA, JAMES DARREN, STANLEY BAKER, DAVID NIVEN ET ANTHONY QUINN

 

HAPPY BIRTHDAY, EILEEN !

EILEEN HECKART (1919-2001), ACTRICE DE SECOND PLAN AU FORT CARACTÈRE, À L’HUMOUR MORDANT, VUE DANS PLUS DE 100 FILMS ET TÉLÉFILMS

 
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Publié par le 29 mars 2021 dans ANNIVERSAIRES

 

« AMERICAN WOMAN » (2018)

Produit par Ridley Scott, réalisé par son fils Jake à qui on doit deux intéressants longs-métrages : « GUNS 1748 » et « WELCOME TO THE RILEYS », « AMERICAN WOMAN » est un drame psychologique de l’Amérique profonde, centré sur le portrait d’une femme complexe et imprévisible.

Sienna Miller élève seule sa fille qu’elle a eue très jeune. Celle-ci a un bébé. Elles vivent entourées de leur famille, la mère Amy Madigan et la sœur Christina Hendricks qui vivent juste en face. Mais un jour la fille disparaît et Sienna doit prendre son petit-fils en charge. On ne sait pas très bien comment va se développer le scénario, en tranche de vie, en plaidoyer féministe ou en polar de serial killer. Mais on cesse de se poser la question, car le film, intimiste, réaliste, en forme de chronique, immerge tout doucement, sans même qu’on s’en rende compte et finit par exister par lui-même, hors des clichés et des genres. Il faut dire que les comédiennes sont exceptionnelles : Miller dans un de ces rôles complexes, à la fois bouleversante et insupportable, qui firent la gloire d’aînées comme Gena Rowlands. Hendricks magnifique en souffre-douleur toujours présente au-delà des crises, Will Sasso parfait dans le rôle de son gros mari patient et placide, Amy Madigan en chef de clan au visage parcheminé. Seule faiblesse du film : le numéro incongru d’Aaron Paul, qui se la joue Actors Studio à fond, dans une espèce de décalque anachronique du jeu à la Marlon Brando des années 50. Quelle mouche l’a piqué ? « AMERICAN WOMAN » est donc une œuvre très singulière et personnelle, qui déjoue toutes les attentes et parvient à toucher au cœur, sans aucune facilité dans le pathos. L’idée d’escamoter certains passages cruciaux, pour développer l’avant et l’après, est vraiment bien assumée. À découvrir.

SIENNA MILLER, PAT HEALY, AARON PAUL, AMY MADIGAN ET CHRISTINA HENDRICKS

 
 

« DU SANG DANS LE DÉSERT » (1957)

HENRY FONDA

Basé sur un scénario solide et « adulte », « DU SANG DANS LE DÉSERT » d’Anthony Mann a bien passé l’épreuve des années, grâce à la force de son casting, à des dilemmes moraux bien exposés et un discours antiraciste bienvenu, défendu par « l’honnête homme » n°1 du western U.S. : Henry Fonda qui endosse un rôle plus ambigu que de coutume.

Par bien des aspects (la présence de Fonda justement, en bounty hunter, celle de Lee Van Cleef, le thème du vieux pistolero et de son disciple), le film annonce le western italien, mais l’austère noir & blanc, la rigueur de la mise-en-scène le classent plutôt dans la catégorie du « TRAIN SIFFLERA TROIS FOIS ». Ex-shérif devenu chasseur de primes, Fonda s’arrête dans une petite ville pour y déposer un cadavre et récolter sa prime. Il fait la connaissance d’un jeune shérif (Anthony Perkins), puis s’attache à sa logeuse et à son garçonnet « sang-mêlé », qui l’adoptent aussitôt. L’inexpérimenté Perkins demande à Fonda de lui enseigner les ficelles du métier. À partir de là, les péripéties s’enchaînent, les obstacles s’accumulent : d’abord Neville Brand, affreux « bully » raciste qui convoite l’étoile argentée, puis Van Cleef et son frère, deux hors-la-loi métis qui assassinent John McIntire, le bon docteur local. « DU SANG DANS LE DÉSERT » vaut essentiellement pour la finesse d’écriture des protagonistes, surtout Fonda qui à 52 ans, offre une silhouette mythique d’homme usé, cynique mais fiable. Face à lui, Perkins ne démérite pas en ado attardé mal embouché mais courageux. Tous les seconds rôles sont excellents, hormis Betsy Palmer et Mary Webster, les deux seuls personnages féminins, beaucoup moins bien écrits et interprétés sans aucun relief. On pourra regretter une happy end exagérément optimiste, détonant avec le reste du film, mais cela demeure un très bon western psychologique et l’occasion de revoir Henry Fonda dans un de ces rôles qui – à l’instar de « L’HOMME AUX COLTS D’OR », par exemple – annoncent clairement son travail avec Sergio Leone la décennie suivante qui sera ouvertement inspiré des films d’Anthony Mann et Edward Dmytryk.

NEVILLE BRAND, ANTHONY PERKINS ET LEE VAN CLEEF

 

LARRY McMURTRY : R.I.P.

LARRY McMURTRY (1936-2021), ROMANCIER ET SCÉNARISTE, CÉLÉBRÉ POUR SA VISION ICONOCLASTE DES VIEUX MYTHES AMÉRICAINS
 

« COUP DE FOUDRE À SEATTLE » (2009)

Voir l’article

LOVEÉcrit et réalisé par Brandon Camp, « COUP DE FOUDRE À SEATTLE » fait partie de cette catégorie de films qu’on choisit par hasard, qu’on regarde par désœuvrement et qu’on termine par paresse. C’est une « rom-com » approximative, au scénario anémique, au casting incertain, une sorte de néant sur pellicule.

Gourou du deuil (sic !) Aaron Eckhart qui a écrit un best-seller et donne des conférences à travers les U.S.A., se retrouve à Seattle où sa femme est morte trois ans plus tôt. Il rencontre une fleuriste vaguement poétesse (Jennifer Aniston) dont il va tomber amoureux et qui va lui redonner goût à la vie. Tout se passe dans des décors d’hôtels luxueux, des restaurants, c’est une enfilade de lieux communs d’une bêtise insondable et d’un ennui phénoménal. La moindre idée est téléphonée des heures à l’avance (toute la sous-intrigue du cacatoès) et, pire que tout, les deux vedettes ne fonctionnent pas ensemble à l’image. Eckhart, bon acteur, mais sans éclat ni personnalité très marqués, manque clairement de charme et de fantaisie, il se débat comme un poisson hors de l’eau. Quant à Aniston, elle se contente de puiser dans sa réserve de mimiques déjà largement mise à contribution dans la série « FRIENDS ». Autour d’eux, les seconds rôles sont, soit atroces (Dan Fogler, jouant l’agent d’Eckhart), soit mal utilisés comme l’excellent John Carroll Lynch en père endeuillé ou Martin Sheen en beau-père bourru. Judy Greer et Frances Conroy font tapisserie. À éviter à tout prix donc, ce « COUP DE FOUDRE À SEATTLE » (bravo, le titre français !) d’une indigence absolue, d’un amateurisme inexcusable. D’ailleurs le réalisateur n’a signé qu’un seul autre film neuf ans plus tard, et c’est très bien ainsi.

LOVE2

JENNIFER ANISTON

 
 

« LA VIE ET RIEN D’AUTRE » (1989)

Écrit par Jean Cosmos et Bertrand Tavernier, réalisé par ce dernier, « LA VIE ET RIEN D’AUTRE » se situe en 1920, dans la campagne française ravagée par la guerre. Sabine Azéma est une grande bourgeoise arpentant les hôpitaux à la recherche de son époux porté disparu, Philippe Noiret est l’officier chargé de comptabiliser les morts anonymes qui se comptent par milliers.

C’est cette rencontre improbable, cette histoire d’amour impossible que raconte ce film ample dans sa réalisation et intime dans la description de ses protagonistes. Elle, d’apparence d’abord fantomatique avec sa voilette, cassante et hautaine, qui tombe peu à peu le masque. Lui, harassé, dégoûté par sa tâche déprimante et sans fin. On les voit évoluer dans ces champs boueux, sous un ciel plombé, se repousser, se rapprocher, faire naître de fugitives lueurs d’espoir s’éteignant aussi vite. C’est très certainement un des plus beaux rôles de Noiret – si ce n’est le plus beau – qui le montre physiquement changé, débarrassé de tous ses tics de jeu habituels, pour embrasser les paradoxes de ce rôle complexe, probablement un de ses plus humains et profonds. Face à lui, Azéma n’a jamais été meilleure dans son retour à la vie progressif et douloureux. Autour d’eux, un excellent cast de seconds rôles : Jean-Pol Dubois en chauffeur zélé, Maurice Barrier tonitruant en sculpteur bon-vivant, Michel Duchaussoy parfait en général déplaisant. Avec une mention spéciale à l’irremplaçable François Perrot, seule touche humoristique du film, en officier chargé de dénicher un cadavre destiné à devenir le « soldat inconnu ». Ses démêlées avec sa troupe « d’Annamites » sont vraiment délectables ! « LA VIE ET RIEN D’AUTRE » est un très beau film, ambitieux, sensible et également très instructif sur les retombées de la guerre, une période dont on parle rarement dans les films. Une des plus éclatantes réussites de Tavernier.

SABINE AZÉMA, PHILIPPE NOIRET ET JEAN-POL DUBOIS
 

« ÉCHEC À LA GESTAPO » (1942)

JUDITH ANDERSON, CONRAD VEIDT ET KAAREN VERNE

« Humphrey Bogart », le livre de référence de Bernard Eisenschitz sorti en 1965 présentait « ÉCHEC À LA GESTAPO » de Vincent Sherman comme un suspense de propagande antinazie de la Warner, comme il s’en faisait beaucoup à l’époque, et vantait la crédibilité de « Bogie » en valeureux ennemi du Reich.

Aussi quelle n’est pas la surprise en découvrant le film, tant d’années après, de se rendre compte qu’il s’agit d’une grosse comédie de gangsters à la façon de Damon Runyon, où une bande de petits malfrats du Bronx déjoue les plans d’espions allemands infiltrés à New York ! Bogart, à peine sorti du « FAUCON MALTAIS », joue un caïd nommé ‘Gloves’ (parce qu’il ne cesse d’ôter et de remettre ses gants !) qui enquête sur le meurtre de son pâtissier préféré, sur les ordres de sa vieille mère (Jane Darwell). Le ton adopté est aussi grotesque que déroutant et surtout, personne ne semble faire le même film : Conrad Veidt, Peter Lorre et Judith Anderson jouent leur partition comme un film d’espionnage à la Fritz Lang, Bogart vraiment pas fait pour le style « BLANCHES COLOMBES ET VILAINS MESSIEURS », tente de surnager. Mais il est constamment flanqué de faire-valoir comiques jouant ses sbires, qui lui piquent la vedette et désamorcent systématiquement tous les moments dramatiques. Ainsi, William Demarest a-t-il un temps de présence anormalement hypertrophié en bras-droit bagarreur, qui devient pratiquement le centre de gravité du film. L’histoire d’amour entre Bogart et la chanteuse Kaaren Verne tombe comme un cheveu sur la soupe. Quel machin déconcertant que « ÉCHEC À LA GESTAPO » ! On comprend que les critiques du livre cité plus haut – qui ne l’avaient probablement pas visionné – aient pu ainsi se méprendre à son égard en lisant le synopsis. Il a tout d’un thriller de circonstances, et à l’arrivée n’est qu’un produit improbable, absolument pas maîtrisé, comme semi-improvisé (la longue et embarrassante séquence où Bogart se fait passer pour un nazi devant une assemblée d’espions, en multipliant les « sieg heil »). À oublier au plus vite donc, ce quasi-navet bénéficiant du savoir-faire du studio, pour un résultat consternant.

À noter : Bogart, Lorre et Veidt se retrouveront l’année suivante pour de plus heureuses circonstances, en apparaissant dans le classique des classiques : « CASABLANCA », pour le même studio.

KAAREN VERNE, HUMPHREY BOGART ET PETER LORRE